Présentation du Conseil canadien des affaires dans le cadre des consultations prébudgétaires menées en vue du prochain budget fédéral
La situation actuelle de notre pays est très différente de ce qu’elle était il y a quelques mois à peine. Nous faisons face à un défi double d’une envergure considérable : une transition difficile et non linéaire vers une relance sécuritaire et durable et la nécessité d’adopter un plan de croissance économique et de prospérité à long terme.
L’ampleur réelle du défi que nous avons à relever est vertigineuse : certains secteurs de l’économie ont été durement touchés, et ce, possiblement de manière permanente. Plusieurs Canadiens et Canadiennes ne retrouveront jamais leur emploi. La confiance des consommateurs demeurera modérée pendant une longue période. Sans un vaccin universel, la peur de la contagion du virus ne s’estompera pas et continuera de se répercuter sur les comportements économiques. Nous exhortons le gouvernement fédéral à continuer de travailler sans relâche avec toutes les provinces et tous les territoires afin de mettre en œuvre une stratégie globale et pancanadienne pour le dépistage et le traçage de la COVID-19.
Facteurs à considérer à court terme
Endiguer la propagation du virus devrait continuer de représenter la plus grande priorité pour le gouvernement. Une deuxième vague qui entraînerait d’autres fermetures serait catastrophique à la fois pour l’économie et la capacité du gouvernement de fournir un appui financier. Freiner les activités économiques pendant encore longtemps aurait des effets dévastateurs puisque les gouvernements n’auront plus les moyens de soutenir financièrement les particuliers et les entreprises et de stimuler l’économie.
Il est donc primordial que nous collaborions tous ensemble pour permettre la réouverture sécuritaire des écoles et des services de garde. Si ce n’est pas fait adéquatement, le marché du travail en sera gravement affecté et plusieurs parents ne pourront pas retourner au travail. Rebâtir la confiance des consommateurs en respectant des protocoles sanitaires stricts est, et continuera d’être, essentiel pour toutes les entreprises.
Le Conseil canadien des affaires est fier d’avoir dirigé la promesse APRÈS, une plateforme de formation et d’éducation permettant aux entreprises de formuler, à l’intention de leurs clients et de leurs employés, une déclaration volontaire, attestant qu’elles prennent des mesures pour lutter contre la COVID-19. Le Conseil canadien du commerce de détail, le Conseil des grandes villes canadiennes, la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante et la Building Owners and Managers Association of Canada font partie de nos partenaires.
Certains secteurs se heurtent à des défis de taille alors que la demande s’est presque complètement effondrée et qu’il n’y aura pas de retour à un semblant de vie normale dans un proche avenir ; voilà ce qui est le cas des transporteurs aériens, des secteurs du tourisme et de l’hébergement, ainsi que de plusieurs entreprises dans l’industrie des services. Des mesures particulières pour les secteurs faisant face à une transition plus longue vers leur viabilité devront être envisagées. Le gouvernement devrait également étendre ses programmes de soutien à la formation pour les travailleurs déplacés aux secteurs qui éprouveront des difficultés à se remettre des effets économiques de la COVID-19.
L’effondrement soudain de la demande découlant des mesures de confinement dans le contexte de la pandémie a nui davantage à l’industrie pétrolière et gazière, qui souffrait déjà d’une guerre des prix à l’échelle mondiale. Des mesures d’octroi de liquidités supplémentaires devraient être envisagées pour aider tout particulièrement les petites et moyennes entreprises à composer avec la volatilité récente des prix.
Un plan de croissance économique et de prospérité à long terme
Les répercussions profondes de la COVID-19 ne se font pas que ressentir au pays, mais également partout dans le monde. Les ramifications géopolitiques, c’est-à-dire comment les États-nations redéfiniront leurs intérêts économiques et politiques dans un monde où les forces structurelles favorisent le retour au protectionnisme et à l’autopréservation, auront de lourdes conséquences. Ce pourrait en réalité être l’impact le plus durable de cette crise extraordinaire. Les pays réagissent en prenant rapidement des mesures pour défendre leur avantage concurrentiel en vue d’attirer les talents et les investissements. Le Canada doit emboîter le pas.
Avant la COVID-19, le Canada était déjà confronté à d’importantes difficultés économiques. Pendant que les décideurs réfléchissent aux mesures et aux stratégies pour assurer la relance, ils doivent éviter de perdre de vue les enjeux structurels qui nuisent à notre compétitivité sur le plan économique, par exemple la population vieillissante, la baisse de productivité au travail, les faibles niveaux d’investissements dans les entreprises, les entraves structurelles au développement des entreprises et les obstacles réglementaires qui vont bien au-delà des oléoducs. Le Canada est en train de perdre l’avantage que pourraient lui procurer une population jeune, de vastes investissements de capitaux étrangers et des gains de productivité dans des domaines ayant une importance stratégique. Les tendances démographiques exercent à elles seules des pressions sur les marchés du travail et les bassins de gens compétents tout en diminuant les revenus tirés des impôts et en augmentant les dépenses en santé et dans les programmes sociaux. Il faut faire volte-face par l’entremise d’un programme politique soutenu qui permettra d’accroître notre compétitivité.
L’an dernier, le Conseil canadien des affaires a créé un groupe de travail sur l’avenir économique du Canada. Nous avons mobilisé des Canadiens et des Canadiennes dans l’ensemble du pays afin de proposer des politiques visant à favoriser la croissance et à assurer un meilleur avenir pour tous et toutes.
Le rapport et les recommandations du groupe de travail ont décrit comment le gouvernement, les entreprises et d’autres intervenants peuvent travailler ensemble pour renforcer la capacité économique du Canada et pour stimuler des investissements qui profiteront à tous les Canadiens et toutes les Canadiennes. Ils faisaient également appel aux employeurs d’accroître le potentiel humain en encourageant la diversité et l’inclusion en milieu de travail, en promouvant la santé mentale et en appuyant un effectif plus compétent et novateur.
Le rapport était axé sur de grandes initiatives visant à faire augmenter la productivité, soit moderniser le contexte réglementaire, accorder la priorité à des projets d’infrastructures importants à l’échelle nationale, moderniser et simplifier le régime fiscal, repenser la politique étrangère du Canada pour un monde en évolution, accroître l’immigration pour bâtir l’effectif dont le Canada aura besoin et, finalement, élaborer une stratégie nationale relative aux ressources et au climat. Dorénavant, le Canada doit également composer avec la montée du protectionnisme et les pays qui désirent gérer leurs échanges commerciaux pour mieux déterminer leur avenir.
La transition vers une économie de plus en plus axée sur des actifs intangibles, comme la propriété intellectuelle, les logiciels, les données et les marques, transforme les sources de la valeur économique et les participants. Plus de 90 % de la valeur du S&P 500 réside désormais dans ces actifs intangibles. Étant donné leurs fonctions et caractéristiques uniques, le Canada doit actualiser ses outils stratégiques conventionnels pour favoriser la croissance des entreprises nationales novatrices qui pourraient être concurrentielles sur la scène mondiale à l’ère des actifs intangibles. Le Canada doit se doter d’une nouvelle stratégie relative aux données et à la propriété intellectuelle afin d’exploiter la pleine valeur de ses actifs en innovation.
À l’instar du reste du monde, nous devons également nous préparer au défi multidimensionnel des changements climatiques. Il faudra notamment se munir d’infrastructures plus résilientes au climat et prévoir des investissements importants pour appuyer la transition vers une société à faibles émissions de carbone.
Comme nous l’avons vu dans le contexte de la COVID-19, un plus grand partenariat entre les entreprises et les gouvernements du Canada peut mener à de grands exploits. Le Plan canadien de mobilisation du secteur industriel pour lutter contre la COVID-19 annoncé par le gouvernement en mars dernier a montré la force de notre base industrielle et la débrouillardise de nos entreprises pour trouver des solutions aux problèmes complexes et urgents. Le déploiement d’une approche axée sur les défis au moyen d’outils de politiques publiques comme l’approvisionnement en vue de créer une nouvelle demande pour des produits et des services canadiens et de stimuler l’innovation est prometteur.
De manière générale, le Canada doit adopter une politique économique plus ciblée et un cadre économique solide pour demeurer concurrentiel. À long terme, le niveau de productivité est l’élément le plus déterminant de la qualité de vie d’un pays. Les taux de productivité du Canada ont accusé du retard pendant des décennies, entraînant ainsi une diminution des revenus et une réduction du pouvoir d’achat des ménages.
Plutôt que de se concentrer sur les bilans corporatifs ou les parts de marché au niveau international, un programme politique pour la compétitivité à long terme doit favoriser une croissance plus dynamique afin d’offrir des occasions et des emplois à tous les Canadiens et toutes les Canadiennes et de leur permettre de s’enrichir. Les décisions que nous prendrons et les choix que nous ferons auront des conséquences à long terme sur la prospérité du Canada. Nous demandons au gouvernement de collaborer avec le milieu des affaires pour élaborer un programme politique qui permettra de rebâtir notre économie et de la rendre plus concurrentielle.